(Jur) Revirement de jurisprudence : les conditions d’exonération de la responsabilité de la SNCF

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Une voyageuse, munie d’un titre de transport, circulait dans un compartiment de train bondé, lorsqu’elle a été victime d’un écrasement du pouce gauche à la suite de la fermeture d’une porte automatique.Quelques jours plus tard, elle assigne la SNCF mobilités aux fins de la voir déclarée entièrement responsable de son préjudice et condamnée à lui payer une provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice.Selon une jurisprudence constante, rendue au visa de l’article 1147 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016–131 du 10 février 2016, le transporteur ferroviaire, tenu envers les voyageurs d’une obligation de sécurité de résultat, ne peut s’exonérer de sa responsabilité contractuelle en invoquant la faute d’imprudence de la victime que si cette faute, quelle qu’en soit la gravité, présente les caractères de la force majeure (Cass. 1re civ., 13 mars 2008, n° 05-12551, Cass. ch. mixte, 28 novembre 2008, n° 06-12307).Toutefois, aux termes de l’article 11 du règlement CE n° 1371/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007, sans préjudice du droit national octroyant aux voyageurs une plus grande indemnisation pour les dommages subis, la responsabilité des entreprises ferroviaires relative aux voyageurs et à leurs bagages est régie par le titre IV, chapitres I, III et IV, ainsi que les titres VI et VII de l’annexe I du règlement n° 1371/2007.Et selon l’article 26 de l’annexe I du règlement précité, le transporteur est responsable du dommage résultant de la mort, des blessures ou de toute autre atteinte à l’intégrité physique ou psychique du voyageur causé par un accident en relation avec l’exploitation ferroviaire survenu pendant que le voyageur séjourne dans les véhicules ferroviaires, qu’il y entre ou qu’il en sorte et quelle que soit l’infrastructure ferroviaire utilisée. Il est déchargé de cette responsabilité dans la mesure où l’accident est dû à une faute du voyageur.Ces dispositions du droit de l’Union, entrées en vigueur le 3 décembre 2009, sont reprises à l’article L. 2151-1 du Code des transports, lequel dispose que le règlement précité s’applique aux voyages et services ferroviaires pour lesquels une entreprise doit avoir obtenu une licence conformément à la directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen.Il en résulte que le transporteur ferroviaire peut s’exonérer de sa responsabilité envers le voyageur lorsque l’accident est dû à une faute de celui-ci, sans préjudice de l’application du droit national en ce qu’il accorde une indemnisation plus favorable des chefs de préjudices subis par la victime.Il y a lieu, en conséquence, de modifier la jurisprudence précitée.La cour d’appel d’Aix-en-Provence, accueille les demandes de la passagère, en retenant que l’article 11 du règlement pose un principe général de responsabilité du transporteur ferroviaire au-dessous duquel les États membres ne peuvent légiférer, ainsi qu’un principe de droit à indemnisation. La cour d’appel ajoute que l’article 26, § 2, b), de l’annexe I, qui n’envisage qu’une faute simple du voyageur, est de nature à limiter la responsabilité du transporteur et, par suite, l’indemnisation du voyageur au regard du droit interne français, plus exigeant sur les conditions d’exonération du transporteur ferroviaire. Elle en conclut que seul l’article 1147 du Code civil, dans sa rédaction susmentionnée trouve à s’appliquer.En statuant ainsi, alors que les dispositions du règlement doivent recevoir application, la cour d’appel viole les textes susvisés.

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