(Jur) L’assemblée plénière précise la notion de loyauté de la preuve

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Un justiciable dépose plainte, s’estimant victime d’une tentative de chantage après avoir été approché par une personne prétendant détenir un enregistrement audiovisuel à caractère sexuel dans lequel il apparaissait. Un officier de police judiciaire, autorisé par le procureur de la République à se faire passer dans les négociations pour l’homme de confiance du plaignant, a, en usant d’un pseudonyme, plusieurs échanges téléphoniques avec une personne se présentant comme l’intermédiaire des malfaiteurs.Un justiciable dépose plainte, s’estimant victime d’une tentative de chantage après avoir été approché par une personne prétendant détenir un enregistrement audiovisuel à caractère sexuel dans lequel il apparaissait. Un officier de police judiciaire, autorisé par le procureur de la République à se faire passer dans les négociations pour l’homme de confiance du plaignant, a, en usant d’un pseudonyme, plusieurs échanges téléphoniques avec une personne se présentant comme l’intermédiaire des malfaiteurs.Les principaux protagonistes de l’affaire sont interpellés et mis en examen, notamment, du chef de chantage et association de malfaiteurs, tentative de chantage en récidive et association de malfaiteurs, complicité de tentative de chantage et complicité de tentative de chantage en état de récidive légale.La cour d’appel de Paris rejette les requêtes, déposées sur le fondement de l’article 173 du Code de procédure pénale, tendant à l’annulation de la procédure en raison notamment de la provocation à l’infraction dont les prévenus auraient fait l’objet de la part d’un fonctionnaire de police. La Cour de cassation (Cass. crim., 11 juill. 2017, n° 17-80313) casse et annule cet arrêt.Saisie sur renvoi, la chambre de l’instruction dit la saisine recevable et, au fond, dit n’y avoir lieu à annulation de pièces de la procédure. La chambre criminelle renvoie l’affaire en assemblée plénière.Constitue une violation du principe de loyauté de la preuve toute provocation à la commission de l’infraction de la part des agents de l’autorité publique.Pour dire n’y avoir lieu à annulation d’un acte ou d’une pièce de procédure, l’arrêt retient que l’obtention frauduleuse de l’enregistrement vidéo, les tractations entre les personnes mises en cause pour trouver le meilleur moyen d’exercer un chantage, les appels téléphoniques et les messages adressés à cet effet au plaignant, les instructions qui lui ont été données pour qu’il trouve un intermédiaire, les rendez-vous fixés à Alger puis à Paris ou encore la rencontre organisée à Clairefontaine constituent des agissements étroitement liés les uns aux autres et accomplis dans le dessein unique d’obtenir la remise de fonds par le plaignant.Les laps de temps plus ou moins longs qui se sont écoulés entre ces différents épisodes ne sauraient être assimilés à des désistements de la part des mis en cause, dès lors qu’il ressort clairement de la procédure que ces derniers avaient un plan très abouti pour parvenir à la remise des fonds. Il en déduit que le policier qui a tenu un rôle d’intermédiaire s’est inséré dans un processus infractionnel indivisible caractérisant une entreprise de chantage et n’a en aucune manière provoqué à la commission de l’infraction.Le stratagème employé par un agent de l’autorité publique pour la constatation d’une infraction ou l’identification de ses auteurs ne constitue pas en soi une atteinte au principe de loyauté de la preuve.Seul est proscrit le stratagème qui, par un contournement ou un détournement d’une règle de procédure, a pour objet ou pour effet de vicier la recherche de la preuve en portant atteinte à l’un des droits essentiels ou à l’une des garanties fondamentales de la personne suspectée ou poursuivie.En l’espèce, le moyen, qui se borne à invoquer le fait que le procédé prétendument déloyal a conduit à l’interpellation, sans démontrer ni même alléguer une atteinte à l’un de leurs droits, n’est pas fondé.Mme Arens, prem. prés. – SCP Spinosi et Sureau, SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Matuchansky Poupot et Valdelièvre, av.   NOTE : Ce n’est pas la première fois, loin de là, que la Cour de cassation se penche sur le principe de loyauté de la preuve. De manière constante, la chambre criminelle considère que le principe de loyauté dans l’administration de la preuve en matière pénale, qui ne trouve pas à s’appliquer lorsque des preuves sont produites en justice par des personnes privées, s’impose aux autorités publiques chargées de l’instruction et des poursuites.L’assemblée plénière a jugé que le placement, au cours d’une mesure de garde à vue et durant les périodes de repos séparant les auditions, de deux personnes retenues dans des cellules contiguës, préalablement sonorisées, de manière à susciter des échanges verbaux qui seraient enregistrés à leur insu pour être utilisés comme preuve, constituait un procédé déloyal d’enquête qui avait mis en échec le droit de se taire et celui de ne pas s’incriminer soi-même et, ainsi, avait porté atteinte au droit à un procès équitable.Elle a aussi rejeté un pourvoi formé contre un arrêt qui, pour dire n’y avoir lieu à annulation des procès-verbaux de retranscription d’enregistrements de conversations privées produites par le particulier, avait retenu que le seul reproche d’un « laisser faire » des policiers, dont le rôle n’avait été que passif, ne pouvait suffire à caractériser un acte constitutif d’une véritable implication. Ainsi, la nature des actes des enquêteurs apparaît déterminante dans la qualification du procédé utilisé, au regard du principe de loyauté des preuves.Dans la présente affaire, l’assemblée plénière approuve sans surprise la chambre de l’instruction d’avoir décidé que l’intervention de l’enquêteur n’avait en aucune manière provoqué à la commission de l’infraction, puisque les actes accomplis par les personnes mises en cause avant même que le policier n’intervienne comme intermédiaire, liés de manière indivisible aux actes postérieurs, étaient déjà constitutifs d’une tentative de chantage.Surtout, elle précise à quelles conditions ou dans quelle mesure un procédé peut, indépendamment de toute provocation à la commission de l’infraction, être jugé déloyal et donc de nature à justifier une annulation de pièces de la procédure.Tout d’abord, le stratagème employé par un agent de l’autorité publique pour la constatation d’une infraction ou l’identification de ses auteurs ne constitue pas en soi une atteinte au principe de loyauté de la preuve. Seul est proscrit le stratagème qui, par un contournement ou un détournement d’une règle de procédure, a pour objet ou pour effet de vicier la recherche de la preuve en portant atteinte à l’un des droits essentiels ou à l’une des garanties fondamentales de la personne suspectée ou poursuivie.Cette précision est essentielle pour délimiter le champ de la déloyauté. En l’espèce, aucune atteinte aux droits des prévenus n’est démontrée ni même alléguée. 

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